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21 novembre 2022

Ce dont souffrent les patients et la psychiatrie, c’est de 40 ans de clichés et de stigmatisation

Santé mentale 

Le meurtre tragique de Lola, ses circonstances et les motivations de son autrice fascinent depuis quelques jours politiques et médias. À côté de la question de l’OQTF (obligation de quitter le territoire français, ndlr), celles des troubles psychiques présumés de Dahlia B. et de l’état de la psychiatrie française se sont rapidement invitées dans le débat public. Nous avons pu ainsi assister à une explosion de commentaires d’« experts » le plus souvent autodéclarés sur ces questions complexes. Que penser des déclarations des politiques ou de journalistes ?

Dangerosité et clichés

Sous couvert de soulever le problème réel de manque de moyens de la psychiatrie en France, nombreux sont ceux qui n’hésitent pas à déclencher la peur en invoquant la dangerosité supposée des personnes atteintes de troubles psychiques et en apportant des réponses forcément sécuritaires voire asilaires. Ainsi, Éric Coquerel de la France Insoumise tranche sans nuance le 24 octobre sur le lien direct entre profil de tueur en série et troubles psychiatriques. Bruno Retailleau, candidat à la présidence de LR, utilise sans hésiter l’argumentaire de la dangerosité supposée des personnes sortant d’hôpital psychiatrique pour soutenir son projet d’engagement de la responsabilité de l’État.

Les journaux ne sont pas en reste, comme avec la Une du 27 juin de Marianne intitulée « les fous sont dans la rue. 40 ans d’abandon de la psychiatrie ». Le titre angoissant, l’illustration dérangeante et volontairement provocatrice est un archétype dramatique de stigmatisation. Comme si cela ne suffisait pas, nous ne sommes pas épargnés par des professionnels avides de projecteurs livrant des « expertises » à l’emporte-pièce sans tenir compte des nécessaires questions éthiques et de réserve. Le point commun de toutes ces déclarations ? Ressortir les pires clichés, éculés mais tenaces, sur le lien entre dangerosité et psychiatrie. Tout ceci ne manque pas de faire vivement réagir unanimement les personnes concernées par les troubles psychiques, des malades et leurs proches aux professionnels de la santé mentale.

Prévenir, repérer et soigner

La question des troubles psychiatriques paraît toujours marginale et éloignée de nous. Elle concerne pourtant directement beaucoup d’entre nous : 13 millions de Français souffrent de troubles psychiques, et parmi elles 600 000 personnes sont atteintes de schizophrénie soit 1 % de la population. Des chiffres impressionnants, bien loin du nombre de cas d’irresponsabilité pénale défrayant la chronique, 58 cas en 2019 par exemple. Les troubles psychiques concernent forcément un voisin, un collègue un ami, un membre de la famille ou peut-être vous-même. Loin d’être des « monstres » potentiels, les personnes avec troubles psychiques sont comme chacun de nous, aspirant à une vie qui a du sens par la réalisation de leurs projets de vie. Nous savons aujourd’hui que ce n’est pas utopique puisque plus de la moitié des personnes avec une schizophrénie se rétablissent de la maladie. Malheureusement, la souffrance psychique, le retentissement des symptômes, le handicap parfois important, le rejet et la perte d’espoir font que le risque majeur est la dangerosité envers soi-même. N’oublions pas que 9 000 personnes décèdent par suicide pour 200 000 tentatives de suicide par an en France.

Souvent vue et attendue comme simple rôle de contrôleuse sociale, la raison d’être de la psychiatrie est de prévenir, repérer et soigner les troubles psychiques. Soigner un trouble psychique signifie réduire les souffrances liées à ces troubles en réduisant l’intensité des symptômes et la gêne provoqués par ceux-ci. Mais soigner, c’est surtout accompagner les personnes concernées dans le processus de rétablissement : restaurer l’espoir et le pouvoir d’agir et de décision, aider à la réalisation de leurs projets. Ces projets sont le plus souvent de pouvoir s’inscrire dans la société : d’avoir un toit, un sentiment d’utilité sociale comme un emploi, d’avoir une vie relationnelle et citoyenne… Plusieurs moyens existent : les médicaments, les psychothérapies, les soins orientés rétablissement comme la psychoéducation ou la remédiation cognitive sans oublier le travail sur la déstigmatisation et l’acceptabilité des maladies psychiques…

La psychiatrie hors des murs de « l’asile »

Symbole de la stigmatisation de la discipline, l’hôpital psychiatrique, lieu de soins intensifs, peut jalonner une étape de quelques semaines dans le parcours de rétablissement. Mais l’hôpital ne peut plus être réduit à cette caricature de lieu de rétention final et obligatoire de la « folie » d’un autre temps. Pourtant, aujourd’hui encore, l’attention est essentiellement mise sur la diminution du nombre de lits des dernières décennies et la sécurité des hôpitaux pour définir la crise de la psychiatrie. Ce serait méconnaître que la psychiatrie ambulatoire, sous la forme de consultations ou d’activités, est le cœur même de notre activité. C’est en ambulatoire que la psychiatrie s’inscrit clairement dans la communauté et au service du rétablissement, en s’associant aux familles, directement impactées par le trouble d’un proche, aux acteurs de proximité comme les médecins généralistes, les élus, les acteurs médico-sociaux, les milieux associatifs. La psychiatrie révèle son utilité quand elle intervient auprès des patients dans leur environnement et en s’appuyant sur ses ressources. C’est cette psychiatrie qui rend fiers ceux qui y travaillent.

C’est cette psychiatrie qui a besoin d’être reconnue, d’être soutenue, qui souffre de son manque d’attractivité et de ressources rendant les délais de rendez-vous beaucoup trop importants dans nos centres médico-psychologiques par exemple. C’est cette psychiatrie, hors des murs de l’ « asile » qui permet aux « fous » d’être à leur place, c’est-à-dire dans la rue, rétablis, vivant parmi nous et avec nous.

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