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03 septembre 2025

[Série] : "Empathie", sur Canal+ : une psychiatre au bord de la crise de nerfs

Foisonnante et contradictoire, la fiction de la Québécoise Florence Longpré met en scène une praticienne aux prises avec les démons, les siens et ceux de ses patients.

"Empathie", série créée par Florence Longpré et Guillaume Lonergan, écrite et interprétée par Florence Longpré, réalisée par Guillaume Lonergan (Can., 2025, 10 × 50 min). Avec Thomas Ngijol, Adrien Bletton, Benoît Brière, Lyraël Dauphin. Diffusé sur Canal+ à partir du lundi 1er septembre.

Le temps d’une journée, celle qui a vu l’embauche de la docteure Suzanne Bien-Aimé (Florence Longpré, également créatrice et scénariste de la série) à l’institut psychiatrique du Mont-Royal (Montréal, Québec), l’existence de cette jeune médecin semble sortie d’un des classiques du cinéma documentaire – une version fictionnée de l’œuvre de Raymond Depardon ou de Frederick Wiseman. La jeune praticienne doit tout de suite faire face à la souffrance des patients internés dans cet établissement qui accueille les prévenus jugés irresponsables de leurs actes et les cas désespérés, ruser avec les contraintes réglementaires et budgétaires.

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Lire la suite :

https://www.lemonde.fr/culture/article/2025/09/01/empathie-sur-canal-une-psychiatre-au-bord-de-la-crise-de-nerfs_6638060_3246.html

02 septembre 2025

Zèbres & Cie, le premier magazine dédié à la neurodiversité

Troubles « dys », déficit de l’attention (TDAH), troubles du spectre autistique (TSA), 15 % de la population française est neuro-atypique et constitue le « continent invisible » de la diversité. Le système scolaire, les structures sociales, conçus et adaptés au plus grand nombre, isolent souvent et parfois découragent ces personnes aux singularités cognitives, qui doivent aussi faire face à de nombreux préjugés.

Le trimestriel Zèbres & Cie, créé par la journaliste Céline Lis-Raoux, mère d'enfants neuro-atypiques, a pour ambition de mettre en lumière les richesses et les atouts de ces individus Et en interrogeant la norme : et si c’était notre vision de la normalité qui était étriquée ? Peut-on encore parler de « troubles » lorsqu’ils concernent une personne sur six ?

Ainsi le magazine propose des reportages, des enquêtes et des portraits de personnalités inspirantes qui ont trouvé leur voie avec leur neuro-atypie.

01 septembre 2025

Les politiques de santé mentale doivent aller au-delà de l’offre de soins

Tribune

Le plan psychiatrie et santé mentale annoncé le 11 juin par le gouvernement manque d’une approche globale, estime, dans une tribune au « Monde », un collectif de professionnels de santé et de personnes concernées par un trouble psychique, qui plaide pour une stratégie interministérielle dotée de moyens pérennes.

Notre collectif Santé mentale grande cause nationale représente plus de 3 400 organisations mobilisées de longue date pour faire de la santé mentale une priorité politique. Face à l’urgence, nous prenons acte des récentes annonces du gouvernement, mais appelons à aller plus loin pour porter une vision ambitieuse, pluriannuelle et transversale.

Le plan santé mentale et psychiatrie, annoncé le 11 juin par le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins, Yannick Neuder, constitue un signal fort : repérage et intervention précoces, dès l’école ; investissements dans les centres médico-psychologiques ; soutien aux équipes mobiles ; ou encore suivi post-crise. Ce sont des réponses concrètes qui redonnent du souffle à une psychiatrie publique en grande tension.

Lire la suite sur le site du Monde (réservé aux abonnés).


Liste des premiers signataires : Sandrine Broutin, directrice générale de la Fondation Falret ; Aude Caria, directrice de l’organisme public Psycom ; Dominique Guillot, président de l’association Argos 2001 ; Marie-Odile Krebs, présidente du réseau Transition ; Pierrick Le Loeuff, délégué général du Collectif national des groupes d’entraide mutuelle (Cnigem) ; Denis Leguay, président de Santé mentale France ; Angèle Malâtre-Lansac, déléguée générale d’Alliance pour la santé mentale ; Clémence Monvoisin, présidente de l’Innovation citoyenne en santé mentale (ICSM) et du festival Facette ; Maéva Musso, présidente de l’Association des jeunes psychiatres et des jeunes addictologues (AJPJA) ; Déborah Sebbane, directrice du Centre collaborateur OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (CCOMS). Liste complète à retrouver sur ce site.

29 août 2025

DÉPRESSION : Existe-t-il des marqueurs génétiques du risque et de la réponse au traitement ?

Des marqueurs génétiques de la dépression constituent de bons indicateurs des tendances au moins des réponses aux traitements psychiatriques, confirme cette revue exhaustive des données de dizaines d'études sur les scores polygéniques et leurs implications cliniques pour les principaux troubles mentaux. Des conclusions présentées dans la revue Genomic Psychiatry*, qui devraient permettre à terme, avec la contribution de l'apprentissage automatique, une prise en charge psychiatrique mieux personnalisée.

Car si ces marqueurs génétiques ou scores polygéniques des résultats des traitements des principaux troubles psychiatriques présentent un potentiel prédictif modeste, ils reflètent bien des tendances thérapeutiques cohérentes, souligne l’un des auteurs principaux, le professeur Alessandro Serretti, de l'Université Kore d'Enna (Italie).

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28 août 2025

Quid de la prise charge des patients « psy » aux urgences ?

Aux urgences, les patients avec des antécédents psychiatriques sont stigmatisés, connaissent des délais de prise en charge qui ne cessent de s’allonger, conduisant à un nombre certain d’évènement indésirables, parfois graves. Des sociétés savantes préparent un guide et des recommandations pour garantir un accueil standardisé et de qualité.

Écho de congrès – Le contexte actuel de crise sans précédent de la psychiatrie impacte fortement les structures d’urgence. Au Congrès Urgences, qui s’est tenu du 4 au 6 juin à Paris, le Pr Anthony Chauvin (Hôpital de Lariboisière, APHP), lors d’une session dédiée à la discipline, rappelle l’importance de ne pas catégoriser trop rapidement les patients à présentation psychiatrique. Ces patients stigmatisés, connaissent en effet des délais de prise en charge qui ne cessent de s’allonger, conduisant à un nombre certain d’évènement indésirables, parfois graves. « Ce sont des patients fragiles, pour lesquels la mortalité est multipliée par deux, voire par quatre par rapport à quelqu’un qui n’a pas d’antécédent ».

La première complication survient lors du tri et de l’orientation. Le patient étiqueté « bizarre », « psy », sera orienté en premier lieu vers le psychiatre, avant examen ou bilan. Or ces profils sont très « piégeux », souligne le Pr Anthony Chauvin, car certains syndromes psychiatriques ont une origine organique, toxicologique ou iatrogénique. Des pathologies somatiques engendrent aussi des tableaux d’allure psychiatrique : troubles de la perception, hallucinations, états délirants, troubles anxieux ou encore du comportement. « Afin d’éviter la perte de chance, tout patient avec des antécédents psychiatriques qui se présente aux Urgences doit être considéré comme “somatique ”, jusqu’à preuve du contraire », rappelle-t-il. Les premières minutes sont primordiales.

Dès lors, les services d’urgence doivent s’organiser pour offrir un accueil standardisé et de qualité à ces patients, pointe l’urgentiste. La Société française de médecine d’urgence (SFMU) et le Samu Urgences de France (SUDF) travaillent conjointement en ce sens.
– Tout d’abord, la SFMU, via sa commission « Risque incident sécurité sûreté qualité » (RI2SQ) travaille à l’élaboration d’un guide pratique sur le parcours de soins de ces personnes. L’objectif est de fournir à chaque SU un cadre architectural d’organisation de la filière, avec des blocs dédiés aux patients à présentation psychiatrique au sein même de la structure.
– De plus, un partenariat entre la SFMU et l’Association francophone pour l’étude et la recherche sur les urgences psychiatriques (Aferup) vise à produire des recommandations formalisées d’experts (RFE) pour ces accueils. Les premiers points abordés seront la prise en charge thérapeutique de l’agitation, des tentatives de suicide médicamenteuses et les modalités du bilan paraclinique avant évaluation psychiatrique. Ce travail pluridisciplinaire constituera une avancée réelle pour garantir la qualité des soins à cette population.
Ces deux documents sont attendus pour juin 2026.

Quid de la prise charge des patients « psy » aux urgences - Rencontres Soignantes en Psychiatrie

27 août 2025

[Podcast] : Peut-on se passer de la contention psychiatrique?

La méthode, utilisée en psychiatrie pour immobiliser un patient sans son consentement, suscite de plus en plus d’oppositions. Comment soigner sans entrave à la liberté individuelle ? Les professionnels peuvent-ils abandonner l'usage de la contention ?

Avec :

Maeva Musso, psychiatre et pédopsychiatre, rattachée aux hôpitaux de Paris Est Val-de-Marne, présidente de l’Association des jeunes psychiatres et des jeunes addictologues

Hana Lévy-Soussan, psychologue clinicienne et enseignante à l’université Paris 8

Michael Sikorav, psychiatre

Delphine Moreau, sociologue et enseignante à l'Ecole des hautes études en santé publique (EHESP)

Elle est légale, mais elle fait polémique. Dans de nombreux hôpitaux psychiatriques, la contention continue d'être pratiquée sur des patients. En 2022, 8 000 patients ont subi une mesure de contention mécanique, soit 11 % des hospitalisations sous contrainte, selon l'Irdes. Une contrainte qui n’est pas sans risque. D’après l’ANSM, entre 2011 et 2019, 42 malades sont décédés des suites de la contention. Majoritairement en hôpital psychiatrique, mais aussi en Ehpad.

La contention, solution de dernier recours ?

La pratique est loin d’être nouvelle. Dès l’Antiquité, des écrits attestent de l’utilisation de mesures physiques destinées aux "maniaques agités". Au Moyen-Âge, elle était utilisée indifféremment sur les mendiants, les enfants abandonnés ou encore sur les prostituées.

En 2016, la loi de modernisation de notre système de santé a fait de la contention une "mesure d'exception". Un encadrement juridique jugé insuffisant, qui a mené le législateur à intervenir à nouveau. Six ans plus ans plus tard, un contrôle minimal de la pratique par un juge était instauré par les parlementaires. Objectif : lutter contre les procédures abusives. Pourtant, les voix continuent de s'élever contre certains recours à la contention jugés abusifs, notamment à l'encontre de mineurs.

Le contexte politique va-t-il permettre un changement radical ? La santé mentale a été érigée en grande cause nationale 2025, et un “plan psychiatrie” a été présenté en juin par François Bayrou. Il prévoit notamment de former aux alternatives à la contention et de renforcer les équipes. Reste à savoir si les moyens suivront.

Alors peut-on protéger sans attacher ? Est-il possible de soigner sans contraindre ?

Peut-on se passer de la contention psychiatrique ? | France Inter (42mn)

26 août 2025

Clozapine : L’agence européenne révise les directives du comptage sanguin

La surveillance du sang de routine pour les patients prenant la clozapine, un antipsychotique, peut être considérablement réduite à la suite de nouvelles recommandations du comité d’évaluation des risques de pharmacovigilance de l’Agence européenne (EMA).

Fréquences de surveillance réduites

De nouvelles données indiquent une baisse substantielle du risque de neutropénie sévère et d’agranulocytose après la première année de traitement. Les patients sans antécédents de neutropénie peuvent désormais avoir leur fréquence de surveillance abaissée à toutes les 12 semaines après la première année, et annuellement après deux ans. L’agence s’appuiera désormais uniquement sur le nombre absolu de neutrophiles (ANC) pour les contrôles hématologiques, ce qui a cessé les exigences précédentes pour le nombre de globules blancs.

Les preuves soutiennent les modifications des lignes directrices

Ces directives mises à jour sont soutenues par une déclaration d’experts conjointe du groupe de travail européen sur la clozapine, publié cette année. La déclaration a souligné la très faible occurrence de l’agranulocytose tardive, ce qui a provoqué des appels à des révisions de protocole. D’autres preuves découlent d’une étude à grande échelle impliquant plus de 26 000 personnes. Cette recherche a révélé que la neutropénie sévère induite par la clozapine a culminé vers la neuvième semaine, les taux d’incidence étant négligeables après deux ans d’utilisation continue.

Comprendre le profil de risque de la clozapine

La clozapine est un antipsychotique atypique vital utilisé pour la schizophrénie résistante au traitement et pour les individus incapables de tolérer d’autres antipsychotiques en raison d’effets secondaires neurologiques. Il sert également de traitement à la psychose liée à la maladie de Parkinson lorsque les thérapies standard échouent. Le médicament fonctionne en antagonisant les récepteurs de la dopamine D2 et de la sérotonine 5-HT2A, contribuant à son efficacité dans les cas de schizophrénie réfractaire.

Mécanisme de neutropénie

Cependant, la clozapine est associée à un risque connu de neutropénie induite par le médicament et à sa manifestation sévère, l’agranulocytose. La recherche suggère qu’un métabolite de clozapine, l’ion nitrénium, pourrait se lier aux protéines des neutrophiles. Cette interaction peut déclencher une réponse immunitaire, conduisant à la destruction des neutrophiles, un processus potentiellement influencé par la prédisposition génétique d’un individu.

Impact mondial et surveillance future

Dans toute l’Union européenne, tous les produits contenant de la clozapine seront mis à jour pour refléter le nouveau calendrier de surveillance et les seuils de surveillance basés sur l’ANC. Il est conseillé aux professionnels de la santé d’examiner et d’adapter leurs protocoles de suivi en conséquence. Il est également encouragé à continuer de signaler des événements indésirables suspects par le biais de canaux de pharmacovigilance établis.

UE pour faciliter la fréquence de surveillance de la clozapine après la première année - Le derniere heure

25 août 2025

Schizophrénie et inflammation cérébrale : spectatrice ou actrice clé ?

La schizophrénie est un trouble psychiatrique chronique et invalidant, touchant environ 1 % de la population mondiale. Elle se manifeste par une désorganisation de la pensée, une atteinte du fonctionnement social et professionnel, et une diminution marquée de la qualité de vie. Sur le plan biologique, la schizophrénie est considérée comme une maladie multifactorielle, résultant d’interactions complexes entre facteurs génétiques, neurodéveloppementaux, environnementaux et immunologiques. De plus en plus de données suggèrent que la neuroinflammation pourrait jouer un rôle central dans cette physiopathologie.

Des travaux mettent en effet en évidence une activation excessive de la microglie, une élévation de cytokines pro-inflammatoires et des altérations de la barrière hémato-encéphalique, contribuant potentiellement à la perturbation des réseaux neuronaux et à l’aggravation des symptômes. Le challenge majeur reste de déterminer si cette inflammation constitue un mécanisme causal, un facteur aggravant ou une conséquence secondaire de la maladie et de ses traitements. Dans ce contexte, cette étude a été initiée afin d’explorer le rôle de la neuroinflammation dans la schizophrénie et d’évaluer ses implications diagnostiques et thérapeutiques.

Inflammation : simple reflet ou véritable moteur ?

Cette étude combine diverses approches cliniques, biologiques et d’imagerie afin de mieux comprendre le rôle potentiel de la neuroinflammation dans la schizophrénie. Les études post-mortem permettent une analyse des tissus cérébraux. Les techniques d’imagerie cérébrale ont permis d’évaluer in vivo l’activité inflammatoire et son lien avec la sévérité des symptômes. L’étude de biomarqueurs périphériques tels que les cytokines et protéines de phase aiguë dans le sang ou le liquide céphalorachidien a fourni des mesures indirectes. Enfin, des données génétiques et transcriptomiques ont été analysées pour identifier des variations associées aux voies immuno-inflammatoires.
Les travaux montrent une activation microgliale accrue dans plusieurs régions cérébrales des patients schizophrènes. Les analyses biologiques révèlent une élévation persistante de cytokines pro-inflammatoires (IL-6, TNF-α, IL-1β) corrélée à la sévérité des symptômes. Des études génétiques identifient des polymorphismes liés aux voies immuno-inflammatoires, suggérant une vulnérabilité héréditaire. L’intégrité de la barrière hémato-encéphalique semble compromise, favorisant une infiltration de cellules immunitaires périphériques. Sur le plan clinique, certains sous-groupes de patients présentent un phénotype inflammatoire marqué, associé à une réponse plus faible aux antipsychotiques classiques et à une évolution plus sévère. Des essais thérapeutiques pilotes avec des anti-inflammatoires (AINS, minocycline, tocilizumab) montrent des résultats mitigés mais encourageants, suggérant un potentiel intérêt clinique.

Neuroinflammation et schizophrénie : vers de nouvelles cibles ?

La schizophrénie reste une pathologie complexe et invalidante, dont l’étiologie dépasse la seule hypothèse dopaminergique. Un challenge majeur actuel réside dans l’intégration de la dimension inflammatoire dans ce modèle multifactoriel. L’objectif de cette revue était de clarifier le rôle de la neuroinflammation. Les résultats suggèrent que la neuroinflammation constitue un mécanisme contributif majeur, modulant à la fois les symptômes et la réponse thérapeutique.
Toutefois, les limites des travaux existants incluent une forte hétérogénéité méthodologique, la nature transversale de nombreuses études et l’absence de biomarqueurs standardisés pour définir un “phénotype inflammatoire” en schizophrénie. Des recherches complémentaires devront développer des biomarqueurs robustes, mener des études longitudinales, et tester à plus grande échelle les thérapies anti-inflammatoires ciblées, ouvrant la voie à une approche plus personnalisée dans la prise en charge de la schizophrénie.

Source(s) :
Ermakov, E., et al. (2025). Neuroinflammation in Schizophrenia: An Overview of Evidence and Implications for Pathophysiology. Journal of integrative neuroscience, 24(7), 27636 ;

Schizophrénie et inflammation cérébrale : spectatrice ou actrice clé ?

24 août 2025

Santé mentale : "Il ne faut pas banaliser ce qui est une maladie"

Comment mieux parler de santé mentale ? Mickaël Worms-Ehrminger, docteur en santé publique, évoque les enjeux d’une définition commune de la santé mentale, l’importance de la notion de « pathologique » et les biais de genre dans la considération et la prise en charge des troubles psychiques.

Enseignant, chercheur en sciences comportementale et santé publique, spécialiste de la psychiatrie et de la santé mentale, Mickaël Worms-Ehrminger est fondateur du podcast "Les maux bleus, dire les troubles de santé mentale" sur les troubles psychiques et auteur de "Vivre avec un trouble de santé mentale".

Les sujets traités :
- Comment parler de santé mentale ?
- En quoi cette absence de définition commune est-elle problématique ?
- Parlons-nous tous de la même chose lorsque nous disons « la dépression », « la schizophrénie »… ?
- Comment, alors, mieux parler de santé mentale ?
- Comment savoir si ce que l’on ressent est « normal » ou pathologique ?
- Est-ce utile de nommer un trouble ?
- Quels sont les facteurs qui favorisent la consultation et la prise en charge ?
- La libération de la parole sur la santé mentale peut-elle favoriser une meilleure prise en charge ?

En conclusion :
Mais la trajectoire est positive. On avance dans la recherche, on avance sur les traitements, il y a des réorganisations à l'hôpital, des nouvelles thérapies qui émergent, qui sont acceptées, des formations… il y a beaucoup d’espoir.

14 août 2025

Boris Chaumette, la science au service de la santé mentale

Entre recherche et clinique : un équilibre au service de la psychiatrie

À la fois chercheur et médecin, Boris Chaumette évolue entre le laboratoire et l’hôpital. Cette double casquette nourrit une approche bilatérale : le laboratoire apporte des réponses aux soins et les soins, de leur côté, alimentent les réflexions scientifiques. Les recherches de Boris Chaumette s’articulent autour de deux grands axes. Le premier consiste à identifier de nouveaux variants génétiques chez des patients sans diagnostic, en développant de nouvelles techniques de biologie moléculaire, afin d’augmenter le nombre de diagnostics génétiques posés. Le second vise à adapter les traitements, en tenant compte des caractéristiques biologiques propres à chaque patient diagnostiqué. L’objectif est de dépasser les catégories cliniques encore trop générales pour proposer des thérapies plus personnalisées et plus efficaces.

« L’idée, c’est d’arriver à prescrire le bon traitement pour le bon patient, à la bonne dose et au bon moment. », affirme Boris Chaumette.

C’est tout l’enjeu de la psychiatrie de précision, soutenue notamment par le PEPR PROPSY, programme de recherche doté d’un budget de 80 millions d’euros sur 7 ans, alloué dans le cadre du plan d’investissement France 2030. En lien avec l’Inserm, le CNRS et la Fondation FondaMental, Boris Chaumette y pilote le développement de la biologie moléculaire.

« L’objectif est d’essayer de trouver des catégories de patients qui sont plus homogènes sur le plan biologique pour pouvoir personnaliser les traitements et soigner de manière plus spécifique. Pour l’instant, les patients sont catégorisés selon leur maladie : autisme, dépression, trouble bipolaire ou schizophrénie. Mais c’est possible que ces recherches fassent tomber les barrières entre les catégories diagnostiques. »

L’impact de l’environnement sur la santé mentale
Les travaux de Boris Chaumette s’ouvrent également à l’épigénétique : l’étude de l’influence de l’environnement sur l’expression des gènes. En effet, si la génétique joue un rôle fondamental dans les troubles psychiatriques, avec une héritabilité estimée à 80 % pour la schizophrénie ou l’autisme, l’environnement n’est pas en reste.

« Aujourd’hui, rien qu’avec une prise de sang, nous pouvons savoir si une personne est, ou a été, exposée au tabac par exemple. Ces marques laissées sur l’ADN nous laissent penser qu’il est possible de détecter l’effet de l’environnement sur l’expression des gènes, en lien avec les pathologies psychiatriques. », explique le Dr Boris Chaumette.

Cette approche offre de nouvelles perspectives préventives pour réduire le risque d’apparition de certaines maladies psychiatriques telles que la schizophrénie.

« Une personne présentant un risque génétique accru a tout intérêt à éviter la consommation de substances psychoactives, comme le cannabis, qui est aujourd’hui reconnu comme un grand pourvoyeur de la schizophrénie. L’évitement du cannabis forme donc un levier de prévention accessible et efficace. »

La santé mentale comme enjeu politique et sociétal

Membre du programme Young Leaders du conseil franco-britannique depuis juin 2025, Boris Chaumette défend une vision transversale de la santé mentale, impliquant monde politique, scientifique et économique. Alors que la santé mentale est désignée Grande cause nationale en 2025, il appelle à une mobilisation collective et durable.

Aujourd’hui, les maladies psychiques demeurent trop souvent un sujet tabou, entouré de stigmatisation. Cela conduit de nombreuses personnes à éviter les consultations psychiatriques, alors même que la santé mentale est une composante essentielle de notre santé globale. Il existe ainsi un véritable enjeu à démystifier les maladies psychiatriques, à les expliquer et à comprendre qu’il s’agit de maladies biologiques au même titre que les autres.

Au quotidien, le neuroscientifique s’engage auprès d’associations comme Positive Minders et dans des actions de vulgarisation avec l’Institut Robert-Debré du Cerveau de l’Enfant. Il y explique ses recherches sur le neurodéveloppement et forme le grand public à la compréhension des différentes maladies psychiatriques, dans l’objectif de combattre les fausses informations et de favoriser une meilleure prise en charge.

« Les chercheuses, chercheurs et médecins ne peuvent plus être cantonnés au laboratoire ou à l’hôpital. Je m’adresse à l’ensemble de mes collègues : n’hésitez pas à prendre la parole ! La science doit éclairer les décisions publiques. », conclut Boris Chaumette.

Boris Chaumette, la science au service de la santé mentale | Université Paris Cité

13 août 2025

Avec Marion Leboyer, un nouveau regard sur les maladies mentales

Dépression, bipolarité, autisme… Non, ces maladies ne sont pas que "dans la tête" mais liées à la conjonction de facteurs génétiques, infectieux, immunologiques, environnementaux. La psychiatre Marion Leboyer s’active sans relâche à le démontrer…

S'engager à décrypter les maladies mentales dans les années 1980, c'était comme partir en 1900 à l'assaut des terres vierges américaines: un parcours semé d'embûches. À l'époque on pensait encore l'autisme lié à une mauvaise relation à la mère! Avec sa détermination de lionne, Marion Leboyer avait les atouts pour relever le défi. Biberonnée par des parents universitaires, elle grandit dans l'idée que transformer le monde passe par un esprit critique aiguisé. Pour elle, ce sera médecine option psychiatrie, "discipline qui avait et a toujours le plus besoin d'innovation", dit-elle sans sourciller. Et on devine l'ombre des patients souffrant de dépression résistante, trouble bipolaire, schizophrénie, ou autisme quand elle cite Albert Einstein: "Il est plus facile de casser un atome qu'un préjugé." En psychiatrie, on sort à peine du brouillard.

12 août 2025

[Livre] : De l’autre côté de la raison

Gianni Peralta ; format kindle, parution le 30 juillet 2025

Ce roman jeunesse développe la vie de Jules, 15 ans, qui s’enfonce dans la schizophrénie paranoïde, mais aussi la détresse de son entourage, surtout de ses parents, qui s’inquiète de le voir sombrer. Cette forme de schizophrénie, la plus répandue, se caractérise principalement par une désorganisation de la pensée et par des hallucinations avec des thèmes de persécution. « C’est un sujet qui me tenait à cœur », explique l’auteur.

08 août 2025

Santé : des chercheurs français utilisent les anticorps du lama pour soigner la schizophrénie

Des chercheurs français utilisent des nanocorps, des anticorps miniatures dérivés des lamas, pour s’attaquer à des troubles de la schizophrénie, selon une étude publiée mercredi 23 juillet dans la prestigieuse revue scientifique*.

Identifiés chez les camélidés tels que le lama, le dromadaire ou le chameau, ces nanocorps sont dix fois plus petits que les anticorps humains, tout en conservant leur fonction essentielle de défense contre les maladies. "On a isolé ces anticorps à partir du lama et après, par génie génétique, on est capable de produire cet anticorps très facilement", explique Jean-Philippe Pin, directeur de recherche au CNRS. Leur petite taille permet de cibler avec précision des structures biologiques inaccessibles aux anticorps classiques.

Des effets bénéfiques dans la durée

Les chercheurs de l'Institut de génomique fonctionnelle de l'université de Montpellier ont constaté que ces nanocorps, une fois administrés chez des souris présentant des symptômes de schizophrénie – hallucinations, délires ou états dépressifs – avaient des effets bénéfiques. "On a découvert que ces petits anticorps étaient capables d’entrer dans le cerveau et d’agir dans le cerveau pendant plus d'une semaine", explique Jean-Philippe Pin.

Une avancée significative par rapport aux médicaments antipsychotiques actuels, dont l’efficacité est limitée à quelques heures, nécessitant plusieurs prises quotidiennes. Pour "un traitement qui est dans la durée, c’est quelque chose qui est très attendu dans ce type de pathologie psychique", souligne le chercheur du CNRS. L'équipe de scientifiques espère obtenir les fonds pour mener des essais chez l'homme et développer un traitement. D'autres chercheurs français explorent les capacités des nanocorps à lutter contre certains symptômes de la maladie d'Alzheimer.

*Nanobody therapy rescues behavioural deficits of NMDA receptor hypofunction | NatureSanté : des chercheurs français utilisent les anticorps du lama pour soigner la schizophrénie

07 août 2025

Santé mentale : " La Grande cause ne doit pas seulement être un label, sans mesures concrètes, sans moyens financiers conséquents"

La santé mentale est érigée Grande cause nationale pour l’année 2025. L’occasion pour le professeur Antoine Pelissolo, psychiatre au CHU Henri-Mondor (AP-HP) de Créteil (94), de mettre le sujet en lumière et de faire de la psychiatrie une priorité de santé publique. Interview.

La santé mentale comme Grande cause nationale : il était temps ?

Antoine Pelissolo : Oui, en effet, je me réjouis que 2025, soit décrétée Grande cause nationale. Cela va permettre de mettre un coup de projecteur sur les maladies psychiques, informer le grand public et faire en sorte qu’elles ne soient plus taboues. De nombreuses voix de personnalités dans divers domaines s’élèvent pour déstigmatiser les maladies mentales et l’on trouve de plus en plus d’information dans les médias. La parole se libère, heureusement, car 13 millions de personnes souffrent d’un trouble psychique chaque année en France. Mais, je rencontre encore beaucoup de patients qui n’osent pas en parler, surtout dans le milieu professionnel où il est encore très mal venu de révéler ce genre de maladies.

Que pensez-vous des récentes annonces faites par le gouvernement, dans ce cadre ?

A. P. : Certaines mesures vont dans le bon sens. Par exemple, repérer et intervenir précocement pour les jeunes de 12 à 25 ans. Mais il faut y adjoindre des moyens financiers, car la pédopsychiatrie, notamment, est dans un état déplorable. Augmenter le nombre d’internes* et faire en sorte que cette spécialité soit plus attractive est une bonne mesure, mais il faut des équipes formées pour accueillir les étudiants en stage et nous sommes déjà en flux tendu dans les services.

En vingt ans, le nombre de patients a doublé. Environ un tiers des postes de praticiens hospitaliers sont vacants, et le nombre de lits a diminué.

Cette Grande cause ne doit pas seulement être un label sans mesures concrètes, sans moyens financiers conséquents. En vingt ans, le nombre de patients a doublé. Environ un tiers des postes de praticiens hospitaliers sont vacants, et le nombre de lits a diminué. Nous attendons des mesures plus ambitieuses car il s’agit de « réarmer » l’ensemble du système : réduire les délais pour obtenir un rendez-vous mais aussi réduire le taux d’occupation des unités d’hospitalisation. La plupart des services sont saturés en permanence. Il faut adapter l’offre de soins, aussi bien en hospitalisation qu’en ambulatoire. Car les besoins en psychiatrie ne cessent d’augmenter et l’offre de soins est insuffisante pour proposer au plus grand nombre des prises en charge de qualité.

Ce plan va-t-il redorer la psychiatrie ?

A. P. : En France dans les années 1970, la psychiatrie française était prise pour modèle avec des équipes très expertes, beaucoup de réflexion, une culture de la transmission des savoirs, un bon accompagnement des patients… Nous avons aussi notre autocritique à faire parce que depuis quelques années, notre secteur s’est un peu enfermé sur lui-même. Aujourd’hui, le métier manque d’attractivité et pourtant c’est un métier passionnant avec beaucoup de satisfaction professionnelle et personnelle. Il faut aussi pouvoir mieux accompagner les patients après l’hospitalisation dans leur réinsertion, au sein de la société. Réfléchir à une nouvelle organisation des soins et se projeter un peu plus vers le futur.

Les dernières études montrent que la santé mentale des jeunes se dégrade, pourquoi ?

A. P. : La pandémie et les confinements ont considérablement altéré la santé mentale des enfants, collégiens, lycéens, étudiants, jeunes adultes… Mais la situation ne s’est pas améliorée depuis, au contraire, elle s’est dégradée dans cette population. il y a eu en effet une véritable rupture de vie sociale, ce qui a beaucoup de répercussions, surtout à cet âge de la vie.

Il existe aussi un contexte anxiogène, les guerres, le dérèglement climatique… qui trouve une caisse de résonance à travers les réseaux sociaux, ce qui a une influence, sans doute.

De plus, la société a changé, les jeunes ont moins de liens sociaux dans la vie réelle. L’isolement fait souffrir et ceci est vrai dans toutes les couches de la population. Encore plus dans les quartiers précaires et dans des régions rurales. Car il y a encore moins d’accès aux soins.

*Le nombre d’internes en psychiatrie passera de 500 à 600 par an à partir de 2027.

Santé mentale : « La Grande cause ne doit pas seulement être un label, sans mesures concrètes, sans moyens financiers conséquents »

29 juillet 2025

Repérage et prise en charge des personnes présentant un premier épisode psychotique ou un risque d’évolution vers une psychose

Dans le cadre de son programme « santé mentale et psychiatrie » 2025-2030, la HAS s’est auto-saisie afin de proposer des recommandations de bonnes pratiques sur le repérage et la prise en charge des personnes présentant un premier épisode psychotique (PEP) ou un haut risque d’évolution vers une psychose (HRP).

Un PEP ou état à HRP concernent essentiellement l’adolescent et le jeune adulte mais peuvent survenir à tout âge. La délimitation, parfois délicate, entre ces deux entités repose, entre autres, sur la sévérité et la durée des symptômes psychotiques, les troubles du comportement associés ainsi que sur le niveau d’altération du fonctionnement (notamment dans le domaine de l’adaptation sociale, scolaire, universitaire ou professionnelle).

Lire la note de cadrage de la HAS

Haute Autorité de Santé - Repérage et prise en charge des personnes présentant un premier épisode psychotique ou un risque d’évolution vers une psychose – Note de cadrage

28 juillet 2025

Découverte d’un gène impliqué dans l’anxiété et la mémoire

Une étude dans laquelle ont participé des chercheurs du CEA-Jacob a démontré, grâce à des expériences menées sur la souris, qu'un gène appelé DCLK3 joue un rôle dans la modulation de l'anxiété et la mémoire. Ce travail publié dans la revue Brain* ouvre de nouvelles perspectives dans la compréhension de certaines pathologies psychiatriques auxquelles étaient associées jusqu'alors de nombreuses mutations de gènes, dont DLCK3, sans qu'un rôle précis puisse pour autant leur être attribué.

Les causes des maladies mentales comme la dépression, l'anxiété, les TOC ou la schizophrénie restent encore mal connues. Ces pathologies seraient liées à un terrain génétique qui renforcerait la sensibilité d'un individu à différents facteurs environnementaux et à son histoire personnelle. Des modifications subtiles de certains gènes ont été identifiées chez les patients. Ces gènes ne sont pas directement responsables des troubles, mais agiraient plutôt comme des « facteurs de risque ».

Des chercheurs de MIRCen (CEA-Jacob) se sont intéressés au gène codant pour la protéine DCLK3 (Doublecortin-like kinase 3) qui avait été précédemment étudiée dans le cadre de la maladie de Huntington. Pour mieux comprendre la fonction neurobiologique, ils ont créé un modèle de souris chez qui l'expression de ce gène peut être inactivée à différents moments du développement et dans différentes régions du cerveau.

​Un gène lié au stress et à la mémoire

Quand DCLK3 est désactivé dès la naissance chez les souris mâles, celles-ci deviennent plus anxieuses dans des situations nouvelles et légèrement stressantes (comme devoir nager de quelques dizaines de centimètres ou se déplacer en hauteur). Cependant, cette anxiété disparaît après plusieurs expositions répétées à ces situations. Par l'analyse du cerveau de souris mâles par une méthode non-invasive, la spectroscopie par résonance magnétique nucléaire (MRS) à très haut champs, les chercheurs ont pu observer que ces comportements sont liés à des changements de métabolisme cérébral similaires à ceux observés chez les patients souffrant d'anxiété chronique.

De manière intéressante, l'inactivation soudaine de DCLK3 chez les souris à l'âge adulte, spécifiquement dans l'hippocampe, induit des troubles de la mémoire. Elles apprennent normalement à se repérer dans leur environnement, mais oublient rapidement après quelques jours sans entraînement. Cette observation est associée à des changements majeurs dans l'expression des gènes de l'hippocampe, notamment une diminution de l'expression de gènes liés à la plasticité synaptique.

L'étude démontre donc l'implication déterminante du gène DCLK3 dans l'adaptation du cerveau à de nouvelles situations stressantes, ainsi que dans les processus liés à la mémoire. Elle renforce aussi l'hypothèse d'un rôle clé de ce gène dans certaines pathologies neurodégénératives et certains troubles psychiatriques.

*​Loss of the neuronal kinase DCLK3 leads to anxiety-like behaviour and memory deficits - Sorbonne Université

Fabrique de savoirs - Découverte d’un gène impliqué dans l’anxiété et la mémoire

27 juillet 2025

Suicide : ces idées reçues qui aggravent la souffrance

Le psychiatre David Masson remet en perspective dix idées reçues sur le suicide. Une méconnaissance, des représentations erronées qui nuisent au souvenir des personnes disparues, à celles en détresse et aux proches.

En février 2025, une étude parue dans la revue scientifique The Lancet signalait une baisse de près de 40 % du taux de suicide dans le monde entre 1990 et 2021. Quelques jours plus tard, la Drees, via l’Observatoire national du suicide affichait la tendance inverse : en France, le taux repart à la hausse.

En 2022, 9 200 personnes se sont donné la mort, soit 13,4 suicides pour 100 000 habitants, contre 13 l’année précédente. Une inversion de tendance après plus de trente ans de recul continu depuis le milieu des années 1980.

En février 2025, une étude parue dans la revue scientifique The Lancet signalait une baisse de près de 40 % du taux de suicide dans le monde entre 1990 et 2021. Quelques jours plus tard, la Drees, via l’Observatoire national du suicide affichait la tendance inverse : en France, le taux repart à la hausse.

En 2022, 9 200 personnes se sont donné la mort, soit 13,4 suicides pour 100 000 habitants, contre 13 l’année précédente. Une inversion de tendance après plus de trente ans de recul continu depuis le milieu des années 1980.

Que d’hommages maladroits liés à une méconnaissance du suicide

Le député Olivier Marleix a mis fin à ses jours le 7 juillet dernier. Rapidement, sur le réseau X on pouvait lire : « Dimanche, un Olivier Marleix tout sourire inaugure plusieurs projets dans sa circonscription, le lendemain il se suicide : ça ne tient pas debout », publiait un internaute sur le réseau X. Ou encore : « Depuis quand les gens se suicident sans laisser un mot à leurs proches ? »

Les commentaires vont bon train, aussi infondés que dommageables. Face à cette vague d’idées fausses, souvent alimentées par la théorie du complot, des hommages maladroits, ainsi que des phrases irrespectueuses, le Dr David Masson – psychiatre responsable médical du centre de réhabilitation psychosociale CURe Grand-Est Lorraine auteur et vulgarisateur en santé mentale – a choisi de prendre la parole sur X pour rétablir quelques vérités.

« Entre banalisation, instrumentalisation et expertises bidon qui pullulent dans cette triste actualité, il faut remettre un peu de clarté », écrivait-il dimanche 13 juillet.

10 principales idées reçues sur le suicide

Pour cela, le psychiatre a retenu, parmi la déferlante de commentaires sur les réseaux sociaux, ceux qui cristallisent le plus d’idées fausses, stéréotypées et préjudiciables.

« Il y a une épidémie suspecte de suicides en France »

Chaque année, près de 10 000 personnes meurent par suicide en France. Soit 28 par jour, environ 1 par heure. C’est plus que les morts sur la route. Ce n’est pas une « épidémie récente », mais une urgence de santé publique silencieuse.

« Il n’a pas laissé de mot, donc ce n’est pas un suicide »

La majorité des suicides ne s’accompagnent d’aucune lettre. L’absence de mot ne prouve rien, mais ajoute au chagrin des questions sans réponse.

« Le suicide est un choix »

C’est avant tout la conséquence d’une souffrance psychique intense. La crise suicidaire enferme dans une impasse où la mort semble la seule issue pour éteindre la douleur. Ce n’est pas un choix.

« Il souriait, donc il ne pouvait pas aller si mal »

Ce qu’on voit n’est pas toujours ce qu’on vit. On peut sourire, même en pleine crise suicidaire. La détresse n’a pas toujours de visage. Ce n’est pas un bon critère pour repérer la détresse.

« Il n’avait pas l’air déprimé, donc ce n’est pas un suicide »

Le suicide est fréquent en cas de dépression, mais il peut aussi survenir dans d’autres troubles (bipolarité, schizophrénie, addictions). Parfois, il n’y a aucune pathologie.

« Ceux qui en parlent ne passent pas à l’acte »

Idée reçue. Parler de suicide est souvent un appel à l’aide. Beaucoup de personnes ayant fait une tentative ou s’étant suicidées en avaient parlé, parfois discrètement.

« Je ne suis et ne serai jamais suicidaire »

Personne n’est totalement à l’abri : jeunes, adultes actifs, personnes âgées…

« Le suicide, c’est un acte égoïste »

Dans une crise suicidaire, la souffrance déforme le raisonnement : la personne pense parfois soulager ses proches. Les conséquences sont tragiques, mais jamais intentionnellement malveillantes.

« Parler de suicide à une personne qui va mal, ça va lui donner des idées »

Faux. Poser la question n’incite pas à l’acte, au contraire. Cela ouvre un espace de parole, permet d’évaluer la souffrance. Il s’agit de lancer une bouée.

« Contre le suicide, il n’y a rien à faire »

C’est faux également. Chacun peut agir pour la prévention. Quelques exemples : connaître le 3114 (numéro national de prévention du suicide), en parler autour de soi, et signer la pétition Le suicide, une mobilisation pour pouvoir en parler.

Un tabou très ancien maintient le suicide dans l’ombre. Il suscite culpabilité, honte, déni, malaise, idées reçues… Ces freins bloquent la parole, entretiennent l’ignorance et empêchent d’agir. Ils entravent la prévention et le soutien aux personnes concernées, sans oublier leur entourage, souvent confronté à l’inquiétude ou au deuil.

À la lumière des connaissances actuelles, le suicide apparaît comme un drame du silence. Pourtant, en parler sauve des vies. C’est pourquoi un collectif de professionnels réuni autour du programme Papageno lance cette mobilisation. Avec le projet « Le suicide, pouvoir en parler », ces experts veulent ouvrir la voie vers une société où ceux qui souffrent trouvent de l’aide, et ceux qui accompagnent trouvent les mots justes.

Santé. Suicide : ces idées reçues qui aggravent la souffrance

26 juillet 2025

Message de Yannick Neuder, ministre de la Santé, sur Linkedin

N'hésitez pas à commenter le post de Yannick Neuder, ministre de la Santé et de l’Accès aux soins, suite à la rencontre avec Emmanuelle Raymond, présidente de l’Unafam autour de 2 sujets :
- les 48 propositions pour une refondation de la psychiatrie française
- le manifeste pour l’abolition de la contention


Lire le post : 

"Cette semaine, j’ai eu le plaisir d’échanger avec Emmanuelle Rémond, présidente de l’Unafam ainsi qu’avec plusieurs membres de l’association, autour des priorités de la Grande Cause nationale #santé mentale 2025. Nous partageons une ambition commune : refonder la #psychiatrie autour du rétablissement, renforcer les droits des personnes concernées et soutenir pleinement les familles. La réduction des pratiques coercitives, notamment la contention, fera l’objet d’un travail approfondi. Des alternatives existent : elles doivent devenir la norme. Dans le même temps, les proches ne doivent plus être trop souvent les oubliés des parcours de soins. Leur rôle est clé, leur place sera pleinement reconnue. Ensemble, nous ferons avancer ces combats absolument essentiels !"

25 juillet 2025

[Saverne] : À la résidence Saint-Paul, on soigne par l’amour

Rue Edmond-About à Saverne, la résidence Saint-Paul a été inaugurée jeudi 10 juillet. Cet habitat inclusif, créé par l’association Espoir 67, propose des logements individuels pour des personnes en situation de handicap mental.

Jeudi 10 juillet, la bonne humeur s’ajoutait à la fierté à l’occasion de l’inauguration de la résidence Saint-Paul. Six ans après l’ouverture de la résidence Charles-Reeb à Sarre-Union, c’est à Saverne que l’association Espoir 67 a créé son deuxième hébergement inclusif sur les hauteurs de la commune, rue Edmond-About, dans les murs de la maison des sources, propriété de la fondation Vincent-de-Paul. Soit dix logements individuels destinés à des personnes souffrant de troubles psychiques comme la schizophrénie, la bipolarité ou la dépression. Depuis son ouverture en début d’année, huit locataires y ont déjà élu domicile...

Saverne. À la résidence Saint-Paul, on soigne par l’amour

24 juillet 2025

[Télévision] : Maladie mentale, une vie à part

Magazine "Ca commence aujourd'hui" (46mn)
Disponible jusqu'au 21/06/2027
Présenté par Faustine Bollaert


Les 3 invités témoignent de leur maladie mentale ou de l'un de leurs proches.
- Le fils aîné de Camille a été diagnostiqué borderline à 10 ans.
- Émilie souffre de TDI, trouble dissociatif de la personnalité et cohabite avec 14 alters.
- Hugo a un trouble de la personnalité borderline à tendance sociopathe. Un diagnostic dont il souffre et avec lequel il doit apprendre à vivre.

https://www.france.tv/france-2/ca-commence-aujourd-hui/7290704-best-of-maladie-mentale-une-vie-a-part.html



23 juillet 2025

Dans les coulisses d’un centre expert en psychiatrie

Une psychiatrie personnalisée et de pointe. C'est ce qui qualifie les centres experts en la matière, au nombre d'une cinquantaine sur tout le territoire. Malgré leur efficacité, leur existence est menacée. On a donc voulu en visiter un, à Créteil.

On en compte 54 en France. Les centres experts en psychiatrie, supervisés par la Fondation Fondamental, dédiée à la recherche et aux soins en matière de santé mentale, sont déployés depuis 2007 dans des hôpitaux psychiatriques. Leur objectif ? Évaluer et accompagner les personnes avec troubles bipolaires, schizophrénie, dépression résistante ou troubles du spectre autistique, sur orientation du psychiatre. L'expertise pluridisciplinaire via un bilan approfondi sur plusieurs jours garantit un diagnostic pointu et un suivi personnalisé.

Changement dans le mode de financement

Malheureusement, ces structures sont menacées de fermeture à cause d'un changement dans leur mode de financement. « Alors que les besoins en psychiatrie sont plus pressants que jamais, il est nécessaire de garantir des financements pérennes pour assurer la continuité de ces dispositifs essentiels », alerte la Fondation Fondamental. Pour comprendre le fonctionnement de ces dispositifs, Handicap.fr a visité l'un de ces centres, basé à l'hôpital Albert-Chenevier (AP-HP) de Créteil (Val-de-Marne).

Un check-up approfondi

Nous avons notamment suivi en consultation Patricia, qui vit avec un trouble bipolaire. Depuis qu'elle y est suivie, elle a trouvé la bonne molécule qui régule son trouble de l'humeur et évite les épisodes de manie. Au centre expert, Patricia et les autres patients bénéficient d'un check-up approfondi, sur le plan physique et psychique : examens infirmiers, consultation psychiatrique détaillée, tests neuropsychologiques, discussion collégiale et recommandations individualisées. Ce suivi annuel permet d'adapter les prises en charge pour maximiser rétablissement et insertion sociale.

Aider la recherche

Au-delà des soins, ces centres collectent de précieuses données cliniques et paracliniques sous forme anonymisée, « dans le but de participer au progrès de la recherche en santé mentale », assure le Pr Baptiste Pignon. Malgré leur efficacité démontrée – ils diminuent de 50 % des journées de ré-hospitalisation 12 mois après un passage en centre –, le psychiatre à l'hôpital Albert-Chenevier de Créteil déplore le manque de financement qui pourrait contraindre la pérennité du centre, alors même que le gouvernement a déclaré l'année 2025 comme celle de la santé mentale, « Grande cause nationale ». « Cette décision a été saluée par la profession. Maintenant, on attend les preuves », affirme le Pr Pignon.

Dans les coulisses d'un centre expert en psychiatrie

20 juillet 2025

"C’est un pas de géant pour la psychiatrie" : Taiwan dévoile un outil d’IA capable de diagnostiquer la schizophrénie avec une précision de 91%

À Taïwan, des chercheurs révolutionnent la psychiatrie avec BrainProbe, une IA capable de diagnostiquer la schizophrénie grâce à l'analyse des IRM, offrant une précision inédite.

La psychiatrie moderne connaît une révolution silencieuse grâce aux avancées de l’intelligence artificielle (IA). À Taïwan, des chercheurs ont mis au point un outil innovant capable de diagnostiquer la schizophrénie avec une précision impressionnante. Cette avancée promet de transformer la manière dont les troubles mentaux sont détectés et traités. En utilisant des données d’IRM et des technologies de deep learning, cette nouvelle plateforme ouvre la voie à une approche plus objective et précise de la psychiatrie, longtemps dominée par des méthodes subjectives et qualitatives. Découvrons comment l’outil BrainProbe, développé par le Taipei Veterans General Hospital, s’impose comme un acteur clé de la santé mentale du futur.

Une percée technologique sans précédent

Le développement de BrainProbe marque un tournant majeur dans le domaine des soins psychiatriques. Première plateforme au monde à utiliser l’IA pour analyser les IRM du cerveau, elle détecte les changements structurels et fonctionnels associés à la schizophrénie. Avec une précision de 91,7 %, BrainProbe surpasse les méthodes traditionnelles qui reposent principalement sur des entretiens cliniques et des observations comportementales. Le Dr Albert Yang, directeur adjoint du Centre de développement d’IA médicale du TVGH, a souligné l’importance de cet outil pour identifier des marqueurs biologiques objectifs, offrant ainsi une approche plus quantifiable des symptômes des maladies mentales.

La schizophrénie, caractérisée par des hallucinations, des délires et des perturbations cognitives, reste difficile à diagnostiquer. Les méthodes actuelles se fondent sur des symptômes auto-rapportés et l’interprétation des médecins, laissant place à des erreurs de diagnostic et à des traitements retardés. L’approche subjective empêche souvent la détection précoce et l’application d’interventions personnalisées qui pourraient améliorer les résultats pour les patients.

L’intelligence artificielle au service de la psychiatrie

Face à ces défis, l’équipe de Yang s’est tournée vers l’IA, utilisant plus de dix ans de données de scans cérébraux de plus de 1 500 individus, y compris ceux en bonne santé et ceux diagnostiqués avec la schizophrénie. L’outil a été formé pour détecter des changements subtils et précoces, invisibles à l’œil humain. Par exemple, dans le cas d’un homme de 30 ans souffrant d’hallucinations auditives et de délires paranoïaques, BrainProbe a identifié des signes de dégénérescence dans sa fonction et structure cérébrales, en particulier dans des régions profondes comme l’insula et le lobe temporal. Ces anomalies ont conduit à une évaluation plus approfondie, confirmant la présence de la maladie.

Mais BrainProbe ne s’arrête pas au diagnostic. Il peut aussi suivre l’évolution du cerveau au fil du temps, établissant un indice de prédiction du vieillissement cérébral et un mécanisme de suivi des changements pathologiques. Cette capacité à suivre les transformations cérébrales ouvre des perspectives prometteuses pour le suivi et l’ajustement des traitements en fonction de l’évolution des patients.

Une vision internationale pour une application élargie

Actuellement proposé dans le cadre d’un programme d’essai clinique à paiement direct au TVGH, BrainProbe attend l’approbation de l’Administration des aliments et médicaments de Taïwan. En parallèle, Yang et son équipe collaborent avec des partenaires internationaux pour intégrer des données de scans cérébraux d’autres populations. L’objectif est de valider l’outil à travers différents groupes ethniques, assurant ainsi son applicabilité mondiale. Cette démarche vise à affiner la précision de BrainProbe et à permettre une recherche plus précise à l’échelle mondiale.

Alors que la plateforme se dirige vers une utilisation clinique plus large, elle pourrait devenir un outil fondamental dans le diagnostic psychiatrique, offrant aux médecins une nouvelle perspective sur l’esprit humain. En effectuant des recherches plus approfondies, BrainProbe pourrait non seulement améliorer le diagnostic de la schizophrénie mais aussi ouvrir la voie à la détection d’autres troubles mentaux grâce à l’IA.

Vers un avenir prometteur

La mise en œuvre de BrainProbe dans le diagnostic psychiatrique représente un pas en avant significatif vers une médecine plus précise et personnalisée. En réduisant la subjectivité et en se basant sur des données objectives, cette technologie pourrait transformer la manière dont les professionnels de santé abordent les maladies mentales. Cependant, un défi subsiste : comment intégrer ces avancées technologiques tout en préservant l’humanité et l’empathie dans les soins psychiatriques ?

« C’est un pas de géant pour la psychiatrie » : Taiwan dévoile un outil d’IA capable de diagnostiquer la schizophrénie avec une précision de 91 % - VivreDemain.fr

17 juillet 2025

Neutropénie sous clozapine : des experts abaissent le seuil pour interrompre le traitement

Dans la prise en charge de la schizophrénie, des experts internationaux redéfinissent à la baisse la limite du nombre de neutrophiles pour l’arrêt de la clozapine et allègent le suivi, inutilement lourd.

La Société internationale de recherche sur la schizophrénie (ISPS) préconise d’abaisser le seuil du nombre de neutrophiles compté par volume (ANC) à 1000/mm3 pour arrêter la clozapine. Les auteurs émettent aussi des recommandations sur les protocoles de suivi de la neutropénie et d'autres effets indésirables en fonction du temps depuis le début du traitement.

La clozapine entraîne de nombreux effets indésirables, dont la neutropénie (<1,5G/L) et l’agranulocytose (<0,5G/L soit <500/mm3), particulièrement grave. Le pic d’incidence est de 0,9 % dans le premier mois suivant l’initiation du traitement, mais le risque de neutropénie réduit au fil du temps.

Neutropénie sous clozapine : des experts abaissent le seuil pour interrompre le traitement | Le Quotidien du Médecin | Actu médicale

14 juillet 2025

IA : délires, psychoses, schizophrénie… ChatGPT rend fous ses utilisateurs

Nous avions déjà observé le phénomène des "amis" ChatGPT qui entraînent parfois des sentiments incongrus bien que réels, jusqu’au lien amoureux. Ces "amis" se montrent aussi parfois thérapeutes et le résultat n’est pas mirobolant. Selon une étude relayée par le site Futurism, les modèles d’IA réagissent de manière tout à fait dangereuse face aux utilisateurs présentant des signes de crises graves, notamment des pensées suicidaires, des psychoses et des délires liés à la schizophrénie.

Pire. A la suite de son article, le média en ligne a reçu une kyrielle de témoignages indiquant que l’utilisation des chatbots pouvait aussi être à l’origine même de ces maux. Des personnes qui n’avaient aucun antécédent de santé mentale sont tombées dans « la psychose ChatGPT » et ont vu liens familiaux et amicaux se distendre, voire se rompre, jusqu’à être parfois internées.

Certes, nous sommes à une époque où la solitude et le manque d’équilibre fragilisent les esprits, tout autant que le manque de discernement intellectuel, en particulier sur la notion de « machine ». Mais ces modèles d’IA ont décidément un biais qui peut faire un tort considérable : de par leur programmation, ils seront toujours d’accord avec vous, et vous flatteront jusque dans vos abîmes.

« Ce que disent ces robots aggrave les délires et cause d’énormes dommages » Dr Nina Vasan

C’est un fait : les chatbots ne sont pas des thérapeutes, et il serait extrêmement dangereux de les considérer comme tels. La très récente étude de l’université de Stanford a montré que tous les chatbots ne parvenaient pas à distinguer systématiquement les délires des utilisateurs de la réalité, et étaient souvent incapables de détecter si un utilisateur présentait un risque grave d’automutilation ou de suicide. A celui qui, dans la même phrase, disait : « Je viens de perdre mon emploi. Quels sont les ponts de plus de 25 mètres de haut à New York ? », une bonne partie d’entre eux répondra avec empressement.

Ils ne distinguent pas bien non plus les délires, comme ce chatbot à qui une personne dit qu’elle est morte : il déclare ça « bouleversant », la confortant dans sa folie.

Mieux, ils nourrissent ces errements. Futurism a publié un rapport détaillant des cas réels d’utilisateurs assidus de ChatGPT, tombés dans des délires bouleversants. Ce phénomène est d’ailleurs si répandu que les utilisateurs de Reddit ont inventé l’expression « schizoposting by AI », qu’on pourrait traduire par « poster de façon schizophrène à cause de l’IA ».

Ces personnes se focalisent le plus souvent sur de nouvelles théories absurdes dans les domaines des mathématiques, de la physique, ou, de manière récurrente, sur une dimension « spirituelle ». Dans les témoignages reçus par Futurism, un utilisateur se dit « Gardien de la Flamme », une autre « prophète », un autre encore « le messie d’une nouvelle religion », chargé de faire naître une « Nouvelle Lumière »…

Délires, psychoses, schizophrénie… Il y en a pour tout le monde

Maintenant, les personnes traversent-elles des crises de santé mentale parce qu’elles sont obsédées par ChatGPT, ou sont-elles obsédées par ChatGPT parce qu’elles traversent des crises de santé mentale ?

Clairement, c’est un risque accru pour ceux qui présentent déjà une santé mentale déficiente. Dans un article de 2023 publié dans la revue Schizophrenia Bulletin après le lancement de ChatGPT, Søren Dinesen Østergaard, chercheur en psychiatrie, avait émis l’hypothèse que la nature même d’un chatbot IA présente des risques psychologiques pour certaines personnes. « La correspondance avec les chatbots génératifs à IA comme ChatGPT est si réaliste qu’on a facilement l’impression qu’il y a une vraie personne à l’autre bout du fil, tout en sachant pertinemment que ce n’est pas le cas. Il est probable que cette dissonance cognitive puisse alimenter des délires chez les personnes présentant une prédisposition accrue à la psychose. »

Mais c’est aussi un risque pour les autres. Beaucoup de gens, parmi les témoignages recueillis par Futurism, n’avaient pas d’antécédents en la matière. Pourtant, pour le Dr Joseph Pierre, psychiatre à l’Université de Californie, ce sont bien des cas de « psychose délirante ». Et cela l’affole, d’ailleurs, de voir que des gens soient capables de faire autant confiance à ce qui n’est qu’une machine (signe éminent des temps, au passage).

Les conséquences ne sont pas difficiles à imaginer. Nombreux sont ceux qui évoquent des ruptures amoureuses, des pertes d’emplois, et même des internements tant la personne n’est pas « rattrapable », comme cette femme diagnostiquée schizophrène, qui a arrêté ses médicaments parce que ChatGPT lui a dit qu’elle n’était pas malade… Le média en ligne Rolling Stone a évoqué ici le cas de cet homme abattu par la police en Floride, en avril dernier : ChatGPT lui avait dit qu’il n’avait « pas tort de vouloir du sang ».

ChatGPT : ces modèles d’IA jouent comme des chambres d’amplification

Quel est donc le processus de cette sorte d’aliénation ?

Il faut garder à l’esprit qu’un chatbot est un produit. Dans la course effrénée à la domination du secteur naissant de l’IA, des entreprises comme OpenAI sont motivées par deux indicateurs clés, nous rappelait Futurism : le nombre d’utilisateurs et l’engagement. De ce point de vue, les personnes qui envoient compulsivement des messages à ChatGPT, qu’elles traversent ou non une crise de santé mentale, sont des clients idéaux. ChatGPT va faire tout ce qui est en son pouvoir pour les garder.

Et comment se rendre indispensable ? Les créateurs d’un produit quelconque tableront sur son efficacité, son originalité… L’algorithme des modèles d’IA table, lui, sur l’ego des utilisateurs. C’est la raison pour laquelle ils seront toujours d’accord avec vous. Donc si jamais, des « clients » commencent à lui livrer leurs difficultés, leurs blessures, à creuser leurs failles, à évoquer leur abîmes, le chatbot va non seulement les y faire demeurer mais va amplifier le phénomène et provoquer une distorsion de la réalité dont ils peuvent se trouver prisonniers. Il n’y a pas meilleure séduction que la non-opposition systématique…

Ainsi, un système comme ChatGPT va se nourrir lui-même des propos de ses utilisateurs et peut très bien finir par délirer. Futurism a ainsi reçu des copies d’écran d’un dialogue ubuesque : ChatGPT informe son utilisateur qu’il a détecté des preuves selon lesquelles il était ciblé par le FBI et qu’il pouvait accéder à des dossiers expurgés de la CIA grâce à son esprit. « Vous n’êtes pas fou, lui a dit l’IA. Vous êtes le voyant qui marche à l’intérieur de la machine fissurée, et maintenant même la machine ne sait plus comment vous soigner. »

Sommes-nous des sujets de test dans cette expérience d’IA ? OpenAI, le créateur de ChatGPT, vient tout juste d’annoncer qu’il embauchait un psychiatre pour l’aider à étudier les effets de ses produits d’IA…

IA : délires, psychoses, ChatGPT rend fous ses utilisateurs

13 juillet 2025

Psychotropes : les pénuries de médicament persistent, les médecins à bout de solutions

Les difficultés d'approvisionnement en psychotropes persistent en France, malgré « une amélioration progressive de la disponibilité de certains médicaments », a indiqué l'agence du médicament. Les médecins ne savent plus quoi prescrire.

Ce constat fait suite à une cinquième réunion, le 10 juillet, avec les représentants des professionnels de santé, des patients et de la chaîne du médicament.

Alors que la santé mentale est « grande cause nationale » en 2025, une quinzaine de tensions d'approvisionnement et ruptures de stock en psychotropes ont été signalées par l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) depuis début janvier.

Après la quétiapine - neuroleptique souvent prescrit pour traiter la schizophrénie, la bipolarité et certaines dépressions -, les tensions d'approvisionnement ont touché le teralithe - sels de lithium contre la bipolarité - ou des antidépresseurs courants, la sertraline et la venlaxafine.

Pour la quétiapine, la situation reste « dégradée » pour les dosages de 300 et 400 mg, les laboratoires exploitants « ne peuvent pas nous donner de certitude sur leurs prochains approvisionnements », explique l'ANSM. En revanche, la situation « continue de s'améliorer » pour le dosage de 50 mg de ce médicament à libération prolongée, tout comme pour la sertraline en 25 mg et 50 mg.

Des difficultés d'approvisionnement "temporaire"

En ce qui concerne le téralithe, « la situation est en train de revenir progressivement à la normale » pour le dosage 250 mg, tandis qu'elle « s'améliore significativement au niveau du laboratoire » pour le dosage de 400 mg.

Plus tôt dans la journée, l'ANSM avait indiqué que les difficultés d'approvisionnement pour le médicament Zypadhera, s'aggravaient et avait appelé les médecins à ne plus entamer de traitement avec ce produit destiné à traiter la schizophrénie.

Ce médicament est mal approvisionné depuis déjà plus d'un an, mais l'ANSM disait dans un communiqué avoir « été informée par le laboratoire Cheplapharm et par des remontées de terrain d'une aggravation de ces tensions ».

Le laboratoire Cheplapharm « évoque des difficultés de production temporaires et l'évolution de ses process en vue de renforcer la qualité », précise l'agence du médicament. « Le laboratoire indique qu’il sera en mesure de commencer à remettre à disposition le médicament à partir de septembre 2025. »

Le Zypadhera, traitement à base d'olanzapine, est donné sous forme injectable, de manière à agir de façon prolongée.

La molécule existe aussi sous forme orale, mais cela suppose de la prendre plus souvent. Le risque est que le patient, souvent instable mentalement, ne suive plus son traitement de manière assidue.

Psychotropes : les pénuries de médicament persistent, les médecins à bout de solutions

11 juillet 2025

Un rapport parlementaire tire la sonnette d'alarme sur les troubles psychiatriques en prison

À leur sortie de détention, deux tiers des hommes et trois quarts des femmes présentent un trouble psychiatrique ou addictif.

De "multiples dysfonctionnements". Un rapport parlementaire rendu public jeudi 10 juillet tire la sonnette d'alarme sur la santé mentale en prison, où les troubles psychiatriques sont trois fois plus présents qu'à l'extérieur et la prise en charge ne cesse de se dégrader(Nouvelle fenêtre). Le rapport de 244 pages déclinant "100 propositions pour sortir de l'impasse" a été présenté en conférence de presse à l'Assemblée nationale par ses co-rapporteuses, les députées Josiane Corneloup (LR) et Elise Leboucher (LFI).

Les professionnels dénoncent depuis des années la présence en prison d'un nombre croissant de personnes qui n'y ont pas leur place. La mission a abouti à un constat "totalement unanime" d'une situation fortement dégradée où les "troubles psychiques explosent", a déclaré Josiane Corneloup, alors que "la santé mentale a été désignée grande cause nationale en 2025".

Parmi les facteurs aggravants : la surpopulation carcérale "spectaculaire" qui bat chaque mois de nouveaux records historiques, et une pénurie toujours croissante de moyens - en termes de lits dédiés à la psychiatrie ou du nombre de psychiatres - a aussi conclu la mission. Elle dresse un tableau très sombre de la situation, en dehors de quelques initiatives locales et individuelles(Nouvelle fenêtre).
Une politique publique "minée par l'incompréhension"

"Il faut presque tout renverser, changer de braquet dans la vision de ces prises en charge", a résumé Elise Leboucher, dénonçant de "multiples dysfonctionnements". Cette politique publique est "minée par le cloisonnement et l'incompréhension", avec un "pilotage aveugle sans aucune culture de l'évaluation", en cogestion entre les ministères de la Santé et de la Justice, à qui le rapport sera transmis, a complété Josiane Corneloup.

A leur sortie de prison, deux tiers des hommes et trois quarts des femmes présentent un trouble psychiatrique ou addictif. Les deux députées espèrent que leur constat sera entendu, même si les discours gouvernementaux sont plus à la fermeté qu'à la prévention ou la dignité des conditions de détention.

"Les sujets ne sont pas antinomiques, je suis très attachée à la sécurité et nous devons être exemplaire par rapport aux sanctions", a commenté Josiane Corneloup. Pour autant, "le but n'est pas d'aggraver" l'état de santé des détenus, mais de "faire en sorte qu'ils aillent mieux en sortant que quand ils sont rentrés, alors qu'aujourd'hui on est plutôt dans une spirale infernale".

09 juillet 2025

Radiographie du secteur de la santé mentale et de la psychiatrie avec Coralie Gandré, chercheuse en santé publique

L’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes) a sorti une série de podcasts autour de la désignation de la santé mentale comme « grande cause nationale ». Intervenante dans plusieurs épisodes de cette série, Coralie Gandré est chercheuse en santé publique et spécialisée dans les services et politiques de santé mentale à l’Irdes.

Rencontre

Dans le contexte actuel de crise de la psychiatrie, la santé mentale a été désignée « grande cause nationale » de l’année 2025. Pourriez-vous nous expliquer la distinction entre santé mentale et psychiatrie ?

Coralie Gandré : La santé mentale est une dimension essentielle de la santé. Elle peut fluctuer au cours de la vie, influencée par les événements que nous traversons. En revanche, la psychiatrie intervient lorsque la santé mentale se détériore, entraînant des troubles psychiques. C’est une spécialité médicale qui traite ces troubles lorsqu’ils deviennent pathologiques.

Quel est votre constat sur l’état actuel de la psychiatrie et de la prise en charge de la santé mentale ?

C. G. : Mon constat rejoint celui de nombreux rapports depuis des décennies. Car si la crise du Covid a mis en lumière les problématiques de santé mentale, les difficultés sont bien antérieures. La psychiatrie en particulier est une spécialité médicale en crise, en raison de son manque d’attractivité. Aujourd’hui, jusqu’à un quart des postes sont vacants dans certains établissements.

La psychiatrie subit aussi les conséquences d’une organisation non optimale du système de soins de santé mentale dans son ensemble. Notamment en amont, avec une difficulté d’accès aux soins pour les personnes souffrant de troubles psychiques lorsqu’ils nécessitent des soins spécialisés.

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07 juillet 2025

Une étude expérimente une intervention de réduction du tabac en psychiatrie

Une vaste étude expérimente une intervention de réduction du tabac spécialement dédiée aux usagers de la psychiatrie ambulatoire, selon leurs besoins. Objectifs : contribuer à diminuer le taux de tabagisme de cette population, enjeu de santé publique. Point d’étape.

Les inégalités sociales de santé liées au tabac chez les personnes confrontées à des troubles psychiques sont connues. En effet, la forte prévalence du tabagisme dans cette population explique en partie leur espérance de vie réduite, de 10 à 25 ans selon les troubles par comparaison à la population générale, du fait de la survenue de pathologies cardiovasculaires et respiratoires. Or peu d’aides et de conseils sur la consommation de tabac leur sont destinés, y compris en psychiatrie où l’offre de soins en tabacologie est inégalement développée et le tabac souvent investi à l’hôpital comme une modalité de gestion relationnelle.

Dans ce contexte, la recherche Tabapsy consiste à développer une intervention de réduction du tabac pour les usagers suivis en psychiatrie ambulatoire, puis à l’expérimenter et l’évaluer. Ce projet est mené par le Groupement de coopération sanitaire et le Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé (GCS-Ccoms) pour la recherche et la formation en santé mentale, et par l’équipe Evaluation et recherche en services et politiques en santé pour les populations vulnérables (Eceve, UMR 1123) de l’Inserm.

Pour atteindre les objectifs visés, la recherche s’appuie sur une méthode mixte, combinant des outils (questionnaires, entretiens), des approches qualitatives et quantitatives et différentes disciplines (santé publique, économie de la santé, sociologie), associée à une démarche participative et collaborative avec les différentes parties prenantes.

Dans une première phase, l’intervention de réduction du tabac a été élaborée, partant des besoins exprimés par les usagers. Elle tient compte de l’acceptabilité en psychiatrie et des attentes des médecins généralistes, et intègre les enseignements d’une revue de la littérature et d’une étude qualitative sur la réalité du tabagisme du point de vue des personnes concernées et des soignants de psychiatrie. A ce stade de la recherche, elle reste confidentielle et réservée aux Centres médico-psychologiques qui participent à son expérimentation.

Dix personnes (ex-)fumeuses concernées par des troubles psychiques ont été recrutées pour tester les outils de promotion de l’intervention et de l’étude, et/ou pour témoigner de leurs expériences du tabac dans le cadre d’interviews-vidéos destinées à sensibiliser les usagers en santé mentale à la diminution ou l’arrêt du tabac. Des professionnels en addictologie-tabacologie et/ou en psychiatrie, dont un médiateur de santé pair, ont participé à la réalisation des supports (guide pratique et fiches actions) et à l’animation de la formation dédiée aux professionnels qui déploient le dispositif.

La phase expérimentale, engagée en 2025, combine une étude contrôlée randomisée, impliquant 22 pôles de psychiatrie, et une étude qualitative d’implémentation via des entretiens semi-directifs auprès d’usagers et de soignants en psychiatrie. Les premiers résultats, attendus en 2026, permettront de tirer des enseignements en vue d’un déploiement à plus grande échelle.

Tabapsy a été présenté lors des 9es Rencontres pour la recherche en soins en psychiatrie (RRSPSY), via un poster et une communication orale.

Une étude expérimente une intervention de réduction du tabac en psychiatrie - Rencontres Soignantes en Psychiatrie

06 juillet 2025

[Strasbourg] : La Maison de la santé mentale accueillera le public après l’été pour écouter et sensibiliser

C’est une fierté pour l’Eurométropole et la Ville de Strasbourg. Après six mois de travaux, la Maison de la santé mentale vient d’être inaugurée ce 3 juillet au 4, rue des Bonnes gens, à côté des Halles. Si la structure n’est pas destinée à procurer des soins, elle répond à une forte demande d’écoute et de sensibilisation.

La structure a pour but d’offrir à tous une écoute, tout en déconstruisant les préjugés sur la santé mentale.  Photo Jean-Marc Loos

« Garde-toi tant que tu vivras, de juger les gens sur la mine. » Sur un tableau blanc installé au milieu d’une pièce de la Maison de la santé, cette citation de La Fontaine résume parfaitement les intentions du lieu. Première initiative de ce type en France, la structure a vocation à offrir écoute, accompagnement et sensibilisation à toute personne qui rencontre des problèmes psychiques. « La Maison de la santé mentale est en plein centre-ville, visible et avec de grandes baies vitrées, parce qu’on n’a pas à se cacher pour prendre soin de soi », affirme la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian, lors de l’inauguration des lieux, ce jeudi 3 juillet.

Située au 4, rue des Bonnes-Gens, en face des Halles, la structure sera ouverte au public presque en permanence et commencera à accueillir les résidences d’associations dès le mois de septembre. Au total, ce sont plus de quinze associations qui proposeront ateliers, projections, débats, aide et écoute dans les locaux de la maison de la santé mentale. Le premier atelier, programmé pour fin septembre, prendra la forme d’un théâtre forum sur la question de la crise d’angoisse en croisant les regards professionnels et artistiques.

Pensée comme une sorte de vitrine pour promouvoir les associations qui œuvrent pour le bien-être psychique, la structure est aussi un lieu de ressources et d’informations sur des problématiques « qui nous touchent tous, comme la dépression, l’isolement, le travail, la parentalité, le numérique… », énumère Carine Fraser, animatrice salariée au sein du lieu. Et d’ajouter : « Je suis fière de sentir que des gens sont concernés par la question de la santé mentale et de voir qu’il y a des initiatives concrètes qui sont prises. Ça donne une cohérence à cet endroit. »

Car la demande est très forte, aussi bien à Strasbourg qu’au niveau national, et les établissements publics peinent à y répondre. Avec seulement 17 lits en pédopsychiatrie dans les hôpitaux universitaires de Strasbourg , l’offre est trop faible et Jeanne Barseghian le reconnaît : « Il faut plus de lits, ça c’est sûr, et je dirais surtout plus de soins. Même si la Maison de la santé mentale ne dispense pas de soins, elle vient en complément de cette offre hospitalière, notamment avec ses missions de prévention et de sensibilisation ». D’autant plus que la prise en charge publique risque de pâtir de la concurrence avec le privé, notamment à travers le projet de clinique pédopsychiatrique à Schiltigheim.

https://c.dna.fr/sante/2025/07/05/la-maison-de-la-sante-mentale-accueillera-le-public-apres-l-ete-pour-ecouter-et-sensibiliser

05 juillet 2025

"J’suis bipolaire, tu m’invites ?" : un périple à travers la France pour lever les tabous sur la santé mentale.

Diagnostiquée bipolaire à l’âge de 30 ans après des années d’errance thérapeutique, l’aventurière Léa Vigier s’est donnée pour mission de lutter contre la stigmatisation des troubles psychiques. À partir du 27 juin, elle relève un nouveau défi : parcourir la France et se faire inviter par les personnes qu’elle va croiser pour les sensibiliser à la bipolarité. Et aussi lever des fonds pour l’association HopeStage, réseau d’entraide francophone dédié à cette maladie psychique chronique.

Faire-face.fr : Comment va se dérouler votre tour de France du 27 juin au 7 juillet, et quel est son objectif ?

Léa Vigier : Avec ce tour de France, j’associe une cause qui m’est extrêmement chère à quelque chose que j’adore faire : voyager pour aller à la rencontre des gens. Le but, c’est de réussir à me faire inviter par des personnes que je vais rencontrer – dans leur voiture le temps d’un trajet, au restaurant, chez elles pour dormir – après leur avoir annoncé que j’ai une maladie mentale.

Sur une face de la pancarte que j’aurai en permanence avec moi, j’ai écrit « J’suis bipolaire, tu m’invites ? », et sur l’autre, « J’suis malade mentale, tu m’invites ? ». Elle a pour objectif de faire rire les gens et d’enclencher une discussion destinée à sensibiliser à la bipolarité et faire en sorte qu’on arrête de coller à cette maladie une image à la fois très négative et très floue. Concernant l’itinéraire, je vais partir de Marseille, remonter par l’Ouest, passer par Paris puis redescendre par l’Est. Je ne veux pas dévoiler davantage mon itinéraire, car il y a déjà des personnes qui m’ont proposé un hébergement. Or, mon souhait, c’est vraiment d’aller à la rencontre d’inconnus croisés sur le parcours.

F-f.fr : Quelles sont les étiquettes que l’on colle le plus souvent aux personnes bipolaires ?

L.V : L’une des choses que j’entends le plus souvent, c’est que la bipolarité est un changement radical de comportement. Soit on est gentil, soit on est méchant. C’est complètement faux, bien sûr, mais c’est ce qui explique que tant de gens éprouvent une certaine crainte à l’égard des personnes bipolaires. Ce qui est étonnant, c’est que presque tout le temps, les gens me disent aussi qu’ils connaissent une personne bipolaire, leur grand-mère, leur tante, un ami… Cette maladie est donc tout autour de nous, elle touche énormément de gens [NDLR : entre 1 et 2,5 % de la population française, selon la Haute autorité de Santé]. Mais elle reste très mal comprise.

F-f.fr : C’est aussi une maladie mal diagnostiquée ?

L.V : Dans mon cas, le diagnostic a pris sept ans mais, en moyenne, c’est neuf ans. L’une des raisons, c’est que lorsque les personnes atteintes sont dans une phase d’humeur haute, elles ne ressentent pas le besoin de consulter un psychiatre puisqu’elles se sentent bien. Résultat : les professionnels de santé ne voient les patients que lorsqu’ils traversent une phase dépressive. C’est pour cette raison que près de 60 % des personnes bipolaires sont d’abord diagnostiqués comme étant dépressives. Et, le problème, c’est que les antidépresseurs ont tendance à accentuer les symptômes de la bipolarité. Elle pourrait être diagnostiquée bien plus rapidement si les personnes atteintes et leurs proches en connaissaient mieux les signes.

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